20 Minutes La 21e minute


Un plan sur la comète


A 510 millions de kilomètres de la Terre, la sonde spatiale Rosetta va larguer, mercredi 12 novembre, un robot atterrisseur sur la comète Churyumov-Gerasimenko. La «21e Minute» revient sur cette épopée qui pourrait nous faire découvrir comment la vie est apparue sur la Terre...


Par Vincent Vantighem


Montage Maureen Cros

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L'atterrissage

Comment faire pour «poser» un robot d’une centaine de kilos sur une comète qui avance à la vitesse de 10 kilomètres par seconde? Largué mercredi 12 novembre au matin, Philae doit planer durant sept heures avant d'atterrir en douceur sur la comète «Choury». A moins que…

 

Il y a des gros cailloux longs de 40 mètres sur la piste d’atterrissage. Et des falaises de 60° degrés d’inclinaison sur les côtés. «C’est au milieu de ce bordel qu’on doit se poser», résume l’astrophysicien Francis Rocard.

Mercredi 12 novembre, vers 9h35, la sonde Rosetta va larguer le petit robot atterrisseur Philae, qu’elle transporte depuis 2004. «Si tout va bien, sept heures plus tard, on est sur zone, poursuit le spécialiste du Centre national des études spatiales (Cnes). Les experts ont calculé un milliard de trajectoires possibles. Mais on sait qu’au moindre problème, on est mort!»


La mission Rosetta a coûté 1.3 milliard d'euros

La france a participé à hauteur de 20%


 

 


 

Francis Rocard

Au moindre dégazage de la comète, le robot dégage...

Francis Rocard, astrophysicien


 

Largué à environ 20 kilomètres de la comète Churyumov-Gerasimenko, le robot de la taille d’un frigo va s’offrir sept heures de chute libre pour se poser tranquillement à la vitesse d’un mètre par seconde sur le «site J» qui a été retenu. La marge d’erreur est d’un kilomètre sur les quatre que mesure la comète. «Sur Terre, Philae pèse 100 kilos, poursuit Francis Rocard. Mais dans l’espace, avec la gravité, cela revient à un gramme! Vous imaginez bien qu’au moindre dégazage de la comète, on dégage…»


 

* ESA/Rosetta/MPS for OSIRIS Team / AFP

Baptisée, en 1969, du nom de ses découvreurs ukrainiens, Churyumov-Gerasimenko est une comète binaire, qui possède deux lobes et un noyau central. Elle mesure environ 4 kilomètres sur 3,5. Située dans l’orbite de Jupiter, elle tourne sur elle-même en 12,4 heures. Elle se trouve, actuellement, à près de 500 millions de kilomètres de la Terre.

 

* Image personnelle de Klim Churyumov

Le 11 septembre 1969, Klim Churyumov (à droite) examine une plaque photographique de la comète Comas Solà prise par Svetlana Gerasimenko à l’Institut d’astrophysique d’Almaty (Kazakhstan). En examinant les bords de la plaque, il découvre un objet cométaire qui n’avait jamais été identifié auparavant...

 

* ESA/Rosetta/NavCam

Les experts estiment à un kilomètre environ la marge d’erreur lors de l’atterrissage. «Si on tombe sur un caillou, c’est mauvais. Mais surtout, si on tombe sur une falaise avec 60° degrés d’inclinaison, on est mort !», témoigne Francis Rocard.

 

Pour éviter cela, Philae est doté d’un matériel hors norme digne du X-Wing de Luke Skywalker dans La guerre des étoiles. Dès que le robot aura posé l’un de ses trois pieds sur la comète, un propulseur le plaquera au sol. Au même moment, trois harpons viendront se ficher à la surface afin d’ancrer le module. «La vraie inconnue, c’est la densité du sol, explique Francis Rocard. S’il est trop meuble, on peut s’enfoncer. Ca pourrait empêcher Philae de faire toutes les analyses, voire perturber les communications avec la Terre.» Au final, les experts estiment avoir une chance sur deux que l’atterrissage se déroule parfaitement. A 510 millions de kilomètres du poste de pilotage, c’est beaucoup et peu à la fois…


 

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L'information met 28 minutes pour franchir les 510 millions de km de la comète à la Terre


Aux origines du Big Bang

Et si la réponse à nos questions existentielles se trouvait à 500 millions de kilomètres de chez nous ? En sondant le sol de la comète grâce au robot Philae, les scientifiques espèrent retrouver les macromolécules de carbone qui ont «ensemencé» les océans de la Terre juste après la formation du sytème solaire. C’était il y a 4,6 milliards d’années...

 

A l’origine, il n’y avait rien. Ni matière ni espace. Ni temps. Et puis, une étincelle a jailli. Extrêmement puissante, c’est elle qui a mis le feu engendrant ce que les scientifiques ont appelé le «Big Bang». C’était la création de l'univers, il y a 14 milliards d’années environ. Dix milliards d'années plus tard, «le Soleil s’est formé, Jupiter aussi, poursuit l’astrophysicien Francis Rocard. La Terre, elle, s’est créée environ 20 à 30 millions d’années après.»

Une perturbation a, ensuite, envoyé les comètes aux quatre coins de l’univers. «On pense que ce sont elles qui en tombant sur la Terre ont ensemencé les océans», poursuit le scientifique.

Le projet initial de la mission Rosetta consistait à ramener sur Terre un «échantillon cométaire». «Trop compliqué !» ont finalement tranché les scientifiques. «Les molécules qu'on souhaite analyser n'ont pas bougé depuis des milliards d'années. Nous n'aurions pas pu les faire revenir sur Terre sans les endommager lors du voyage. Du coup, les expériences menées n'auraient pas eu de sens», décrypte encore l'astrophysicien Francis Rocard. Le robot Philae a donc été équipé d'un concentré de technologie high-tech afin de réaliser les expériences in situ.


Rosetta est équipée de 24 propulseurs

Les ailes de la sonde sont équipées de panneaux solaires et ont une envergure de 32 mètres


 

L'atterrisseur Philae


  • Le spectromètre APXS
  • Les caméras CIVA
  • Le tomographe CONSERT
  • Le chromatographe COSAC
  • Le cartographe MUPUS
  • L’analyseur de gaz PTOLEMY
  • La caméra ROLIS
  • Le magnétomètre ROMAP
  • La foreuse SD2
  • Le sondeur électrique SESAME
Le spectromètre APXS

1Le spectromètre APXS

Conçu en Allemagne, APXS a pour but de déterminer la composition chimique du sol sur lequel Philae va se poser. La poussière sera ainsi analysée et comparée aux analyses déjà effectuées sur des météorites connues.

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Les caméras CIVA

2Les caméras CIVA

Fierté française conçue à Orsay (Essonne), CIVA est un système de sept caméras miniatures censées réaliser des panoramas de la surface de la comète afin de reconstruire la structure en trois dimensions.

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Le tomographe CONSERT

3Le tomographe CONSERT

Très utilisée en imagerie médicale, la tomographie va permettre à Philae de déterminer le volume du noyau de la comète «Choury». En envoyant des signaux radio à travers le noyau, CONSERT devrait parvenir à en déterminer les contours.

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Le chromatographe COSAC

4Le chromatographe COSAC

Son boulot est d’identifier et de quantifier les poussières de comète et les molécules organiques. Pour cela, les échantillons prélevés seront placés dans un four à température moyenne (180°C) et un autre à haute température (600°C).

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Le cartographe MUPUS

5Le cartographe MUPUS

MUPUS a pour but de comprendre les propriétés et la stratification de la surface de la comète. Surtout de voir comment la surface évolue en fonction de l’ensoleillement.

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L’analyseur de gaz PTOLEMY

6L’analyseur de gaz PTOLEMY

Fabriqué en Grande-Bretagne, PTOLEMY va permettre aux scientifiques de comprendre la géochimie des éléments tels que l’hydrogène, le carbone, l’azote et l’oxygène. Il travaille également avec les deux fours installés sur Philae.

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La caméra ROLIS

7La caméra ROLIS

Sorte de «GoPro» installée sur un skieur en pleine descente, ROLIS livrera les premières images du site d’atterrissage à mesure que Philae descendra. Elle devrait aussi servir à faire des recherches sur la minéralogie de la surface.

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Le magnétomètre ROMAP

8Le magnétomètre ROMAP

Bourré d’électronique, cet instrument a pour objectif scientifique d’étudier le champ magnétique et les ondes plasma émises par la surface en fonction de la distance de la comète au Soleil.

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La foreuse SD2

9La foreuse SD2

Son boulot est simple: Creuser jusqu’à 250 mm sous la surface de la comète et distribuer les échantillons aux instruments COSAC, CIVA et PTOLEMY pour analyse.

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Le sondeur électrique SESAME

10Le sondeur électrique SESAME

Situé sur les trois «semelles» de Philae, SESAME doit mesurer les propriétés mécaniques et électriques de la surface de «Choury». Cela devrait permettre de comprendre l’histoire de ce gros caillou.

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L'atterrisseur Philae L'atterrisseur Philae
 

Transportant en leur sein des macromolécules de carbone et beaucoup de glace, les comètes auraient conduit à la formation des premières bactéries dans les océans. Au fil du temps, les cellules se sont multipliées, les organismes ont grandi. Les méduses, les algues et les éponges ont été les premiers «êtres multicellulaires» à faire leur apparition. Les prélèvements que le robot Philae pourrait réaliser sont donc d’une importance capitale pour les scientifiques.

«Notre idée est de tenter de retrouver des macromolécules de carbone qui ont conduit à la formation de la vie sur Terre», explique ainsi Francis Rocard. Emprisonnées dans la glace cométaire qui n’a pas bougé depuis l’origine du système solaire, ces poussières et molécules sont donc toujours aujourd’hui «dans leur état d’origine».


 

La comète Choury a une longueur de 4km

La comète Choury se déplace à une vitesse de 10km/h


L'épopée Rosetta

Poser un robot à 500 millions de kilomètres de la Terre ne s’improvise pas. Si les yeux du monde entier sont braqués sur Rosetta et Philae, ce mercredi 12 novembre, au moment critique de l’atterrissage, cela fait plus de 20 ans que les scientifiques préparent cette mission. Retour sur cette épopée.

 

Pourquoi Rosetta et Philae ?


 

Découverte en 1799 en Egypte, la pierre de Rosette a permis à Jean-François Champollion de déchiffrer les hiéroglyphes au 19e siècle. Le texte qui y figure est le même message gravé en trois langues différentes (égyptien en hiéroglyphes, égyptien en démotique et alphabet grec). C’est ce qui a permis à l’égyptologue de faire cette découverte.

Quant à Philae, le petit robot atterrisseur, il doit son nom à l’obélisque de Philae qui a permis de compléter les découvertes de la pierre de Rosette. Les scientifiques du Centre d’études spatiales ont donné ces noms car ils estiment que Rosetta et son robot Philae permettront de comprendre et de déchiffrer les éléments ayant conduit aux fondements de la vie sur Terre.


Vers l'infini et au-delà

Non, Buzz l’éclair n’est pas seul. De Bruce Willis à Maître Yoda, le cinéma a accordé une large place aux expéditions spatiales. La «21e Minute» revient sur les films d’attaques cométaires et vous propose un quiz pour savoir si vous connaissez bien votre système solaire.

 

L’espace fait son cinéma


 

Météorite, astéroïde, comète: du pain bénit pour le cinéma qui s’est souvent servi de cette thématique pour livrer des blockbusters. Retour en vidéo sur les principaux films de l’espace.


Le plus WTF

Meteor Man

Frappé par une météorite, un homme se découvre d'étranges pouvoirs avec quelques limites. Il peut voler, mais a le vertige. Il peut contrôler l'information, mais pour 15 minutes seulement. Pourtant, il a la lourde tâche de sauver le monde.
A voir parce qu'Hancock n'a rien inventé...

Le plus célèbre

Armageddon

Bruce Willis et ses potes spécialistes des plateformes pétrolières n’ont pas le profil d’astronautes chevronnés. Mais seuls eux sont capables de sauver le monde de l’astéroïde qui menace de s’écraser sur Terre.
A voir rien que pour la prestation de Steve Buscemi

Le plus sociétal

Deep Impact

Ca ressemble à un blockbuster. Ca a le grain du blockbuster. Mais c’est plus que ça. Un an avant Armageddon et sur un scenario similaire, Deep Impact offre surtout une plongée dans ce que la société est capable de faire de pire quand elle se sent menacée.
A voir pour savoir ce qu’était la période glaciaire

Le plus navet

Post Impact

Une musique angoissante, des tanks qui sautent en parachute et des effets spéciaux ratés. En 2004, les Allemands ont voulu faire leur Armageddon
A voir avec des potes pour une soirée « Série Z »

Le plus touchant

Skhizein

Un homme se prend une météorite de 150 tonnes sur la tête et retrouve son corps à 91 centimètres de son esprit. Une situation inconfortable magnifiquement mise en scène dans ce court-métrage d’animation.
A voir pour une fois qu’un scénario fait preuve d’originalité sur le sujet.

Le plus impressionnant

World Invasion – Battle Los Angeles

Non, ce ne sont pas des météorites qui tombent sur la Terre, mais des extraterrestres. Et ils veulent coloniser la Terre…
A voir sur un grand écran et avec du son qui claque

 

La sonde Rosetta pesait trois tonnes au décollage, dont plus de la moitié était du carburant

Rosetta aura parcouru 6 milliards de kilimètres au moment de larguer son robot atterrisseur


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Connaissez-vous le système solaire?

« 20 Minutes » étire l'espace-temps. A l'occasion de la mission spatiale Rosetta, mercredi 12 novembre, votre quotidien lance le projet « 21e Minute ». Smartphone, tablette ou ordinateur : ce nouveau format bourré d'interactivités est à retrouver sur tous les supports de 20minutes.fr pour vous permettre d'en savoir plus, toujours gratuitement. Ce dossier sera suivi d'autres, alors, restez connectés !

Auteur
Vincent Vantighem

Montage photo/Infographies
Maureen Cros

Web Design/Développement
Olivia Ly

A paraître en décembre 2014

Condamnés à tort

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Et si la justice s'était trompée ? Angélique, Gérard, Roland et Daniel s'estiment condamnés à tort.
20 Minutes lève le voile sur le « Projet Innocence » qui a décidé de leur venir en aide.

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